mercredi 9 décembre 2015

CANET-EN-ROUSSILLON (66) - Château-fort et chapelle romane

Canet-en-Roussillon, ville connue pour ses belles plages de sable fin, à tout de même une
histoire et quelques témoins architecturaux qui montre à quel point
elle comptait à l'évoque médiévale.

Le château-fort et la chapelle romane de Canet-en-Roussillon, édifiés dès le XIe siècle
et restaurés depuis des années, font la fierté de la commune qui dispose ainsi
d'un ensemble patrimonial remarquable.


Le château et la chapelle Saint-Martin-du-Château qui a servi d'église paroissiale
entre la deuxième moitié du XIe siècle et le début du XVIe siècle

Plan des fortifications de Canet-en-Roussillon (château et remparts)

Avec la reprise du Roussillon sur les Sarrasins par les Francs, il fut alors décidé d'établir
un groupe de fortifications, nécessaires pour imposer leur pouvoir.

Ainsi, à Canet-en-Roussillon, sur la bande marécageuse longeant la plage, un embryon
de village fut créé en même temps qu'un premier château, bâti sur une petite colline,
l'isolant des marées.


Dénommé, dans les textes "Castellum de Caned", en 1013 et en 1017, le château est appelé
"Canetum", en 1052. Il fut vraisemblablement construit en bois, avec une tour d'habitation,
pour le seigneur des lieux, associée à une basse-cour palissadée.


 Plan du château avec le donjon (4) et la chapelle castrale (2)

La chapelle castrale fut évidement bâtie à proximité du château.


Le château devint rapidement le siège de la vicomté de Canet au XIIe siècle, avec de
puissants seigneurs comme le premier d'entre-eux, Raimond Bérenger, qui reçut de
Gausfred II "divers gages et garants pour un portion de la ville de Torelles (Torreilles)
et pour le château de Canet". Raimond Bérenger, alors suzerain d'une dizaine
de chevaliers, fut à l'origine de la fortification médiévale en pierres.


Les seigneurs de Canet se succèdent de façon héréditaires. Ainsi,  Pierre Raimond,
mentionné en 1087, succéda à Raimond Bérenger, puis Guillaume 1er, qui
participa avec Guinart, comte du Roussillon à la première croisade
(Antioche en 1098 et Jérusalem en 1099).

Chevet semi circulaire de la chapelle fortifié et avec ses bandes lombardes
(lésènes et arceaux)

Nouveau seigneur de Canet-en-Roussillon, Raimond Bérenger II fut témoin lors
de la signature d'un acte émis par le comte Raimond Bérenger IV
de Barcelone concernant Prats. Il est décédé après 1099.

Peu à peu, la seigneurie de Canet-en-Roussillon prit de l'importance, le port
se développa et le village, placé sous la protection du château seigneurial,
grandit et accueillit des commerçants.



 Bérenger était seigneur de Canet et co-seigneur de Rivesaltes et de Peyrestortes en 1170. Raymond,
son fils lui succéda vers 1198. Guillaume II, cité en 1205, devint le nouveau seigneur de Canet.
Raymond II, fidèle des rois d'Aragon. participa à la bataille de Toulouse (le 16 juillet 1212)
et  aida son suzerain lors de la conquête des Baléares sur les Sarrasins.

Au XIIIe siècle, Canet-en-Roussillon fut fortifié avec une enceinte composée
de plusieurs tours et portes dont il reste quelques éléments
(pans de muraille et deux tours talutées)


Raymond II eut deux fils, Guillaume et Pierre, qui furent élevés par Bernard Hugues
de Serralongue, leur grand-père maternel. Guillaume, en devenant Guillaume III
de Canet, successeur de son père, confirma tous les privilèges accordés par
son grand-père (le 23 mai 1265) moyennant 700 sous barcelonais dont il avait
grand besoin pour partir en guerre aux côtés de Jacques 1er de Majorque
pour la conquête de Murcia (mai et juin 1266).


En décédant, vers 1286, Guillaume III, qui n'eut pas d'enfant de son épouse, Alamande
de Pons de Vernet, laissait ainsi à son beau-frère Pons de Guardia, la seigneurie
de Canet-en-Roussillon. Ce dernier eut mal à partir avec le vicomte de Castelnou,
alors partisan du roi d'Aragon.


Raymond III, fils et successeur de Pons, obtint la mutation de sa seigneurie en baronnie.
En 1312, il trépassa, laissant le pouvoir à son frère Guillaume IV.

En 1322, le roi Sanche de Majorque éleva Canet au rang de vicomté avec un territoire
imposant, en remplacement de la vicomté de Castelnou, resté trop proche de l'Aragon.


Entre le 31 juillet et 3 août 1343, Pierre IV d'Aragon assiégea Canet-en-Roussillon.
La cité et le château vicomtal, alors défendus par le gouverneur François d'Oms, souffrirent
des destructions. Le vicomte Raymond IV, fils et successeur de Raymond III, alors présent
aux côtés de son gouverneur, accepta les conditions imposées par le roi d'Aragon,
en accueillant Philippe de Castro qui le fit arrêter et emprisonner.

Le vicomte Raymond IV fut alors exilé à Gérone. Pierre IV d'Aragon fit installer une
garnison dans le château de Canet jusqu'en 1344, date à laquelle il remporta
une belle victoire sur le royaume de Majorque.

Les travaux de restauration ont permis une reprise totale du parement des murs subsistant,
et la reconstruction progressive des murs sud et ouest. A l'origine plafonnée,
la nef de la chapelle fut dotée d'un voûtement en berceau au XIIe siècle
(effondré depuis !)
Vue du chœur et du  faux transept formé de deux chapelles latérales
aux arcades de briques rouges.

Canet-en-Roussillon fut ensuite donné au cousin de Raymond II, Pierre II de Fenouillet.
Cette donation correspondait à un dédommagement octroyé aux héritiers de cette famille
pour la spoliation dont elle fut victime, au moment de la Croisade albigeoise.

Pierre II de Fenouillet, farouche partisan de l'Aragon, détestait Jacques II de Majorque.
En 1364, le vicomte de Canet fit reconstruire la nouvelle église.



André de Fenouillet, successeur de Pierre II, souhaitait, à travers à son testament,
la création d'un monastère de neuf moines bénédictins à l'intérieur de l'enceinte
du château ; il envisageait aussi de réserver les revenus castraux et des
villages de Torreilles et Sainte Marie, pour leur entretien courant.

De 1398 à 1422, en déclarant Collioure, seul port roussillonnais de débarquement
de marchandises, Canet-en-Roussillon perdit de son importance.


En septembre 1415, l'empereur Sigismond 1er passa une nuit au château de Canet-en-Roussillon,
alors qu'il se rendait à Perpignan pour un pseudo-concile avec l'antipape Benoît XIII
et le roi d'Aragon Ferdinand 1er.

Chapelle castrale - Décors de billettes et de torsades

Au milieu du XVe siècle, le roi de France, Louis XI, à travers ses armées, se rendit maître
des comtés du Roussillon et de Cerdagne suite au Traité de Bayonne. Louis XI devint
également vicomte d'Ille-sur-Têt et de Canet-en-Roussillon. Une garnison française
s'installa alors au château, devenu royal.

Cette place forte tomba entre les mains des Aragonais le 1er février 1472,
grâce à Bernard d'Oms, seigneur de Corbère.

Chapelle castrale - Baie romane en plein cintre

Chapelle castrale - Opus spicatum ou en arêtes de poisson


En 1493, avec la vente du Roussillon, par le roi Charles VIII au roi d'Aragon, Pierre Galcerand
de Castro redevint vicomte de Canet. A sa mort, son neveu, Guillaume Raymond Galcerand,
reprit la seigneurie de Canet-en-Roussillon.

Au cours du XVIe siècle, la ville et son château furent conquis par les mercenaires allemands.

Pendant la Guerre de Trente Ans, les Français l’assiégèrent avec succès.


Donjon circulaire réalisé en pierres de roulis et en briques

Lorsque Louis XIV se rendit maître du vicomté de Canet, il le confia à Joseph Fontanela,
partisan du royaume de France, en écartant du pouvoir la lignée des vicomtes historiques. 

La comtesse de Sforza prit possession du château de Canet-en-Roussillon à la mort de Fontanella. 

Le 27 mai 1730, le duc Hijar, grand d'Espagne, issu d'une branche cadette des premiers
rois d'Aragon, devint le nouveau seigneur des lieux. 

Donjon dérasé, épais de plus de 2 mètres d'épaisseur


En 1789, le château était à moitié en ruine et, en 1830, les habitants utilisèrent
 les pierres du château pour paver les rues de ville.

Depuis 1964, les Amis du Vieux Canet restaurent le château et la chapelle castrale romane.


Vestiges d'un escalier, en briques, menant à une tour


Vestiges des communes du château

Poterne du château


Au nord, à l’ombre de la chapelle, le puits à glace creusé en 1688. 
Couloir menant au puits à glace
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