Le charmant village gardois d'Aiguèze, classé parmi les plus beaux villages de France,
domine l'Ardèche depuis son promontoire rocheux et son château-fort défie toujours les falaises.
Après la bataille de Poitiers contre les Sarrasins (732), la falaise d'Aiguèze reçu une première fortification,
sous la forme d'un fort, construite par le seigneur de Balazuc, à la demande de Charles Martel,
qui souhaitait ainsi contrôler la région et se prémunir des incursions sarrasines.
Vers 1080-1085, le comte de Saint-Gilles et duc de Narbonne, Raymond IV de Toulouse (1060-1105),
pour contrôler le gué situé en contrebas de la forteresse, décida de renforcer la position.
Son départ, en 1087, pour l'Espagne où il envisageait de chasser les Musulmans, puis sa participation
à la Première croisade en Terre Sainte, en 1096, ne lui permirent pas d'achever complètement
le renforcement du fort d'Aiguèze, pourtant si stratégique pour le contrôle de la région.
Le seigneur Pons de Balazuc, qui était alors chargé de cette besogne, ne put mener à bien
sa tâche, étant donné que lui aussi rallia la Terre Sainte comme croisé.
Auteur de "Histoire des Français qui prirent Jérusalem", en compagnie du chapelain
du comte de Saint-Gilles, Raymond d'Aguilers (ou d'Agiles), Pons de Balazuc prit part à l'attaque
et à la prise de Marra, en janvier 1099, mais fut tué, en mai 1099, au siège d'Arqa près
de Tripoli (au Liban), quelques jours avant la prise de Jérusalem.
En 1196, le château d'Aiguèze est cœur d'un conflit opposant le seigneur des lieux
et Nicolas le comte-évêque de Viviers. La forteresse tomba alors entre les mains de l'église d'Uzès.
Vers 1210, le petit-fils de Pons de Balazuc, ayant embrassé la cause albigeoise, défend tant bien
que mal Aiguèze contre les assauts des croisés du Nord. Mais, face à leur supériorité tactique,
il du se rendre à Simon de Montfort, qui prit ainsi possession de la forteresse au nom
du roi de France, Philippe II Auguste (1165-1223).
Parmi les seigneurs d'Aiguèze, du XIVe à la fin du XVe siècle, on peut citer les Sabran
(Renaud de 1329 à 1345 ; Guillaume de 1345 à 1374 ; Amrics de 1374 à 1432 ;
Antoine de 1432 à 1450 ; Henri-Alrics de 1450 à 1463), les Bellemanières
(Godon de 1463 à 1478 ; Thomas de 1478 à 1490).
En 1374, le roi de France Charles V (1364-1380) vendit la moitié de la seigneurie à Pions Bordon,
visiteur général des Gabelles de Pont-Saint-Esprit. Le nouveau propriétaire d'Aiguèze fut, en 1388,
chassé de son château par les Tuchins, bandes de mécontents révoltés contre l'autorité seigneuriale.
Ce groupe de désabusés découvrirent, dans les celliers, d'importantes réserves de blé
qui furent réparties entre les différents membres le composant.
Faisant du château Aiguèze, leur première forteresse "tuchines", les nobles de la région
l’assiégèrent, en 1389, et massacrèrent tous les partisans de ce mouvement.
Le village et le
château furent laissés en ruines et abandonnés.
Au début du XVIe siècle, le château d'Aiguèze fut en partie relevé en même temps que le village
reconstruit. Différents co-seigneurs se succédèrent alors à la tête de la Baronnie d'Aiguèze !
Parmi les seigneurs et barons qui occupèrent le château, nous pouvons citer :
les Châteauneuf, les Beauvoir du Roure, les Chartreux de Valbonne, l’œuvre du Saint-Esprit,
les Meissonnier, les Lussan, les Haucourt-Lorraine, les Faÿn, les Rochemore,
les Voguë et les Romanet.
En 1848, la famille Romanet, alors détentrice du château d'Aiguèze depuis , vendit la seigneurie
afin de solder, en partie, ses dettes.
En 1901, Mgr Fuzet, Archevêque de Rouen, apparenté par sa mère aux
Romanet, acheta la forteresse
et entama des restaurations et
modernisations de l'ensemble castral.
Aujourd'hui le château d'Aiguèze est toujours en possession d'une branche de la famille Romanet
Perché sur une puissante lame de
calcaire urgonien, le château d'Aiguèze se compose de trois tours : la tour sarrasine du XIe siècle reliée à une tour ronde du XIIIe siècle et le donjon rectangulaire du XIIe siècle.
Cette forteresse,
alimentée en eau par un puits, était reliée au chemin
de ronde par un escalier
dont subsistent, en haut, quelques marches taillées
dans le rocher et, en bas, les traces
d’ancrage de marches en bois.
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